Поль Верлен — Paul Verlaine

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Paul Verlaine « Dans les limbes »

Hélas ! je crains fort

Hélas ! je crains fort pour nous deux
Avec nos fichus caractères,
Des avalanches, des cratères
Mieux que fous, pis que hasardeux.

Un zeste de raison nous reste
Pour prévoir et, par conséquent,
Pour aimer et chercher le qu’en-
Dira-t-on, et : zut pour ce zeste !

Grasseye en gamin de Paris
Ce notre caprice moins bête
Encor que méchant quoique honnête,
Et qui fait tout de nos esprits.

Soit, plus de bride, à l’aventure.
Liberté, libertas, et, sans
Davantage ennuyer nos sens
De réserves contre nature,

Allons-y d’une noce en tout,
L’amour, l’ivresse et tous les vices
Amusants, et tous les sévices,
Rendons-nous-les dès mis en goût.

Tous les services aussi, folles
Caresses et coups bien tapés,
Défonçons tous les canapés.
Toutes les querelles frivoles

Et cruelles, payons-nous-les !
Bécotons-nous, puis tue, assomme !
Montre-toi femme, je suis homme,
Griffe, je cogne. Ô pleurs salés,

Cris, jurons ! et ô tendres plaintes,
Sueurs dives, salives bien !…
Or, mettant du tien et du mien,
L’un dans l’autre sans plus de craintes

D’en mal finir, lâche souci.
Bah, vivons tels quels, car le pire,
Pour moi du moins, serait de dire
Un jour : elle n’est plus ici !

Si l’on doit vivre mal ensemble,
Et bien, vivons mal ensemble, ou
Mourons ensemble, car, seul, où,
Comment vivre sans toi ? J’en tremble.

Ainsi, sur mon lit d’hôpital
Je m’agite en propos stériles.
Là ! mes rêves, dormez tranquilles,
Elle va venir, c’est fatal,

C’est écrit, c’est la destinée ! —
Et, comme elle est toute bonté,
La voici dans sa majesté
De reine mienne ramenée.